Dessin de Gaspard R. Décembre 2023 (tous droits réservés)
L’autrice islandaise nous fait encore cadeau d’un roman intime et sensible comme elle en a le secret. Cette fois elle nous raconte un tournant majeur dans la vie d’une femme qui approche la quarantaine. Alba, son héroïne, abandonne son poste de professeur de linguistique à l’Université pour du jardinage et des cours d’islandais aux réfugiés en tant que bénévole, elle quitte son appartement de Reykjavik pour une maison à restaurer dans une campagne désolée, célibataire elle adopte un adolescent réfugié. Pourquoi ce changement? pour corriger son empreinte carbone, pour prendre ses distances avec une histoire de relation inappropriée avec un étudiant mineur, surtout pour donner du sens à sa vie ou un autre sens où la communion avec les arbres et la nature et l’ouverture aux autres devient la priorité exclusive. https://www.batzer.dk/produkt/audur-ava-olafsdottir-eden/
Comme dans tous ses romans le dur climat et la nature noire en lutte permanente pour sa survie dans ces conditions climatiques hostiles sont omniprésents et créent une ambiance singulière. Comme dans son roman « Le rouge vif de la rhubarbe » (https://critiquacroquer.fr/wp-admin/post.php?post=258&action=edit), les personnages sont peints avec délicatesse par leurs actes, comportements et habitudes quotidiens et l’autrice nous permet ainsi de percer avec légèreté leur intimité. Le plus frappant dans « Eden » c’est comment le flux de pensées d’Alba sert de fil conducteur au roman: au début du livre, quand Alba est à l’université, ses pensées la ramène sans cesse à la linguistique puis progressivement elles sont chassées par la restauration de sa maison, la plantation des arbres, la vie des oiseaux, les réfugiés. Comme dans la vraie vie l’enchaînement des pensées qui accèdent à la conscience n’a pas toujours de logique et on change parfois radicalement de sujet dans le même paragraphe. On ne peut pas être plus proche d’Alba, on est dans son cerveau.
Audur Ava Olafsdottir nous livre une fiction proche du réel, d’une grande sensibilité, d’une grande délicatesse, très poétique et militante pour l’écologie et l’accueil des réfugiés. Cette romancière reste une de mes favorites.